Sakés d'exception, pourquoi sont-ils si spéciaux ?
Chaque saké, quel qu'il soit, est le fruit d'une subtile alchimie entre un savoir-faire amélioré au fil des siècles et des ingrédients méticuleusement choisis. Le Toji est le chef d'orchestre de cette symphonie et par ses choix, il détermine le profil aromatique, la catégorie du saké et par conséquent, son positionnement tarifaire sur le marché.
Chaque saké, quel qu'il soit, est le fruit d'une subtile alchimie entre un savoir-faire amélioré au fil des siècles et des ingrédients méticuleusement choisis. Le Toji est le chef d'orchestre de cette symphonie et par ses choix, il détermine le profil aromatique, la catégorie du saké et par conséquent, son positionnement tarifaire sur le marché. Dans certaines situations, les décisions du Toji peuvent avoir un impact considérable, élevant certains sakés au rang de "cuvées exceptionnelles". A travers quelques exemples, et en adoptant une approche progressive, nous souhaitions illustrer ce qui rend ces sakés si uniques.
Le luxe abordable
On trouve déjà de fabuleux Daïginjo pour des sommes relativement raisonnables, mais si l'on est prêt à mettre un peu plus, pour l'expérience, on entre alors dans le monde des sakés d'exception.
Prenons l'exemple du Hyakujuro New Moon. Il s'agit d'un saké produit par une méthode exclusive et brevetée par la brasserie Hayashi Honten appelée "fermentation lactobacillaire sans additif".
Celle-ci consiste à cultiver des lactobacilles pendant les étapes de fermentation. L'objectif est d'augmenter la concentration d'acide lactique dans les cuves pour protéger le travail des levures. La nuance par rapport aux autres techniques est que l'on assiste ici à la présence simultanée de non pas deux, mais trois agents biologiques dans les cuves de fermentation : le Koji, les levures et les lactobacilles. Une véritable révolution dans le concept de "fermentations parallèles" propre au saké.
L'aspect technique ne fait pas tout pour New Moon et le choix des ingrédients est tout aussi déterminant. Le riz utilisé est le Hatsushimo, un riz rare et très aromatique, endémique à la région de Gifu. Idem pour la levure. Nommée "G2", elle est entièrement développée sur ce terroir local. Un saké à découvrir autant pour son élégance que pour la combinaisons de méthodes nouvelles et uniques à mi-chemin entre le Yamahaï et le Sokujo.
Du même niveau, on trouvera Harada Daiginjo par exemple, Shuho Soden Legend, Eiichi Junmaï Daiginjo, ou encore Kameizumi Biryusen.
L'élite des brasseries
Elevons nous à peine pour trouver une catégorie qui regroupe les sakés considérés par chaque brasseries comme leurs Daïginjo les plus aboutis.
Sogen Samurai King en est un exemple, un Daïginjo produit à partir de riz Yamadanishiki "Grade A", qualité la plus élevée qui soit, provenant de la préfecture de Hyogo, une région reconnue pour produire les meilleurs riz à sakés du Japon. Autrement dit, le nec plus ultra. Le degré de polissage est de 35% et la fermentation suit les méthodes classiques de la guilde du Nototoji. A savoir, des mises en œuvre techniques permettant d'obtenir des sakés porteurs d'un umami marqué.
Samuraï King a remporté 19 fois la médaille d'or au prestigieux Concours National des Sakés ! Le soin qui est apporté à la préparation, le choix des ingrédients et la typicité de la méthode ont permis de marquer à jamais l'histoire du "zen koku shishu kampikaï", la référence dès lors qu'il s'agit de juger du travail des brasseurs, un concours organisé tous les ans depuis 1911 par l'Association Nationale des Producteurs de Saké.
A noter que Samurai King est aujourd'hui une rareté puisque la brasserie et ses employés ont été durement touchés par le tremblement de terre du Noto qui s'est produit le 1er janvier 2024. Même si la reprise de la production est annoncée, la disponibilité du Samuraï King risque de se faire attendre longtemps.
Dans la même veine, on retrouve le saké Koi, ou encore Sugata Junmai Daiginjo, Stella Premium, Shichiken Onakaya Tobinkakoï.
La sophistication ultime
On entre dans le domaine de l’art avec ces sakés. Pour les brasseries, il s'agit davantage de partager leur philosophie, leur éthique, dans un rayonnement internationnal. Rares sont celles capables de présenter des sakés d'un tel niveau et voici deux illustrations avec Stella Sense et Shichiken Hakushin.
Stella Sense est un véritable chef d’œuvre produit à hauteur de 250 bouteilles par an, dont seulement 100 sortent du Japon. Le riz entrant dans sa composition est cultivé en terrasses sur les flancs du Mont Tsukuba, plus exactement sur une minuscule parcelle située à l’endroit même où jaillit la source. Il est ainsi irrigué par l'eau la plus pure qui soit. La variété du riz et son degré de polissage ne sont pas divulgués car Inaba Shuzo souhaite se placer au-delà des arguments techniques, privilégiant la qualité artistique du concept.
A travers Stella Sense, cette microbrasserie de cinq personnes seulement expose dans le monde entier un travail d'orfèvrerie, une cuvée ultime réservée aux tables les plus prestigieuses de la planète.
Avec Shichiken Hakushin, la brasserie de Yamanashi Meijo se propose d’illustrer "l’esprit blanc" du Hakushu en rappelant la pureté et la délicatesse de l’eau provenant de la fonte des neiges du Mont Kaikomagatake.
Le riz est cultivé à la même altitude que la source, elle-même situé à la même altitude que la brasserie. Il se nourrit donc de la même eau que celle utilisée dans le processus de production, dans une intention d’homogénéité parfaite. La maturation à -5 degrés pendant un an ajoute encore à l'imaginaire, la fraîcheur des Alpes Japonaises.
Le superbe habillage a été confié à l’artiste Ena Furuya. Native de Yamanashi, sa spécialité est la technique traditionnelle de teinture sur tissu dite "roketsu". On retrouve les montagnes enneigées sur l’étiquette, comme sur l’étui, dans une discrète élégance.
Le lexique associé aux cuvées exceptionnelles
Tsuki-Haze : une manière particulière de préparer le Koji destiné à la production des sakés Ginjo et Daïginjo (en opposition à So-Haze, pour les Junmaï et Honjozo). Dans le cas du tsuki-haze, le Koji kin colonise les grains de riz par l'intérieur et non pas en commençant par la surface.
Seimaïbuaï : le degré de polissage du riz. Il est forcément élevé pour ces cuvées qui rassemble uniquement des Daïginjo.
Sakamaï : le riz à saké. Il est sélectionné parmi les meilleurs souches et dans les meilleures régions de production, pour obtenir les meilleurs sakés.
Kasubuaï : Pourcentage de kasu restant après la presse par rapport au volume de riz utilisé pour la production de saké. En règle générale, plus le kashunuaï est haut et plus le saké est prestigieux.
Kobo : les levures sont choisies avec soin parmi les levures à Ginjo commerciales, régionales ou les levures maison.
Funeshibori ou fukuroshibori : cette méthode de filtration consiste à placer le contenu des cuves de fermentation dans des sacs de toile avant de les presser dans un pressoir en bois. Méthode choisie pour les sakés haut de gamme, en opposition avec l'utilisation de machines de type Yabuta.
Shizukuzake ou Shizukudori : correspond au gouttes de saké qui s'écoulent des sacs de toile dans la méthode fukuroshibori.
Tobingakoï ou tobindori : correspond au cœur de l'écoulement du shizukuzake. Un "Tobin" est une dame-jeanne de 18 litres dans laquelle est stocké le saké.
Binkan : la façon de pasteuriser, ici en bouteille, illustre aussi le soin apporté au produit. En opposition avec Jakan qui consiste à pasteuriser l'ensemble de la cuve.
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