Le guide du saké chaud
Le saké présente la particularité de pouvoir être dégusté sur une large plage de températures allant de très frais (5°C) à vraiment chaud (60°C). Frais, il est appelé "Reishu", dégusté à température ambiante, il prend le nom de "Hiyazake", et le saké chaud devient "Kanzake".
La pratique de faire chauffer le saké serait apparue à Nara au 8ème siècle, mais il était déjà de tradition en Asie continentale, et notamment en Chine, de consommer certaines boissons alcoolisées tièdes ou chaudes.
Le saké chaud se consomme dans les moments les plus froids de l’année, entre les dates remarquables du 9 septembre, ou kiku no sekku, le jour des chrysanthèmes, et du 3 mars, momo no seku, le jour des fleurs de pêche. Ceci dit, certaines régions (et certaines personnes) consomment du saké chaud toute l’année. Il existe d'ailleurs une partie au sud du japon regroupant les préfectures de Yamaguchi, Hiroshima et Okayama, où de nombreuses kura sont spécialisées dans l’élaboration de sakés destinés à être consommés chauds toute l'année ! Y sont organisés tous les ans un concours national, et même un festival du saké chaud qui se déroule en mars.
Ce n'est qu'assez récemment que l'habitude de faire chauffer le saké s’est répandue à travers le monde. Elle correspond à la disponibilité des premiers sakés exportés, aux Etats Unis d’abord, puis en Europe. Une habitude qui transporte le consommateur en un clin d'oeil dans l’univers exotique des traditions japonaises, et une habitude encore bien installée même si l’arrivée en force des catégories premium a quelque peu changé la donne.
Nous vous proposons ce petit guide du saké chaud pour vous permettre, nous l’espérons, de trouver la bonne bouteille, la meilleure méthode, et la température idéale pour optimiser votre expérience de dégustation.
A quel moment consommer un saké chaud ?
Comme évoqué plus haut, certaines personnes consomment du saké chaud toute l’année, mais ce dernier est plus souvent associé aux moments froids de l’année en raison de son caractère réconfortant. Dégusté pendant les repas, il s'accorde parfaitement avec les plats chaleureux de la saison hivernale, les bouillons et soupes, les préparations à base de viandes et légumes mijotés, les fondues.
Pour ceux qui ont eu l’occasion d’aller au Japon en hiver, le premier saké chaud dégusté à votre arrivée au comptoir d’un izakaya a certainement laissé un souvenir impérissable.
Quel est l’intérêt de faire chauffer le saké ?
Chauffer le saké va avoir des effets sur sa texture en bouche, il va s’arrondir, prendre davantage d’ampleur et de corps. Les arômes vont quant à eux se révéler, s’intensifier et de nouveaux vont apparaitre pour une expérience gustative plus gourmande encore. Un avantage particulier est donné aux sakés les plus corsés et riches. Un saké chaud enrobe et sublime n’importe quel accompagnement comme les Otsumami, ces petits plats japonais dégustés de manière informelle autour d’un verre.
Quels types de sakés faire chauffer ?
Tous les sakés ne se prêtent pas à être chauffés. Les sakés Ginjo et Daiginjo, considérés comme délicats, sont généralement dégustés frais ou à température ambiante. Les faire chauffer conduirait à éteindre tout ou partie de leurs belles saveurs florales et fruitées et surtout l’expressivité de leur nez. Il en est de même pour les sakés non pasteurisés (namazake) qui perdraient toute la fraicheur qui fait leur intérêt. Il existe cependant quelques exceptions dans ces catégories.
Les Futsuushu, les Honjozo ou les Junmai, produits à partir de riz au polissage moins élevé, ont généralement des saveurs robustes dans des tonalités céréalières et lactiques qui vont profiter favorablement d’un chauffage. Les caractéristiques distinctives d’acidité et de puissance aromatique des sakés issus des méthodes Yamahai et Kimoto se verront avantagées.
Quelles températures de dégustation du saké ?
Nous reprenons dans ce diagramme l’ensemble des températures de dégustation, de frais à chauffé. Certaines dénominations évoquent de façon poétique des sensations bien réelles (Yukibié : la température de la neige, Hanabie, la bise fraîche du printemps, ou encore Hitohadakan, la température de la peau).
Comment trouver la bonne température ?
Tout d’abord, si vous souhaitez faire l’expérience d’une dégustation d’une même bouteille (un Junmaï par exemple) à différentes températures allant de frais à chaud, nous vous conseillons de commencer par les températures les plus basses, puis de le faire chauffer par la suite (et non l’inverse).
Par contre, dans le cas où vous décideriez de chauffer un saké (à 55°C par exemple), il est intéressant de continuer de déguster en laissant la température diminuer dans le tokkuri. Cela vous permettra de remarquer des différences de saveurs selon la température et de trouver celle qui vous plait le plus.
Comment faire chauffer le saké ?
Chez soi, on peut utiliser deux méthodes qui ne nécessitent que très peu d’équipement.
Au bain-marie : il faut d'abord rincer un tokkuri à l’eau chaude pour enlever les impuretés et commencer à le réchauffer. Remplir le tokkuri de saké et les disposer dans une casserole remplie d’eau puis faites chauffer environ 1 min 30 pour 30°C, 2 min pour 40°C et 3 min pour 50°C. Ces données peuvent varier en fonction du matériau et de l’épaisseur du tokkuri, donc utilisez un thermomètre de cuisine pour contrôler la température. Pour éviter tout débordement, veillez à ne pas remplir complètement le tokkuri car le saké se dilate lorsqu’il est chauffé.
Au micro-ondes : il est également possible de faire chauffer un tokkuri rempli de saké au micro-ondes. Une astuce consistant à faire des tests préalables avec le même volume d’eau vous permettra de déterminer le temps optimal. Notez que le saké chauffe plus rapidement que l’eau.
Les professionnels sont quant à eux équipés de machines à faire chauffer le saké. Vous les avez peut-être déjà aperçus au coin d’un bar ou derrière un comptoir.
Elles peuvent être électriques, sortes de distributeurs sur lesquels on dispose une bouteille magnum ou alors plus classiques, sous forme de bain marie dans lequel sont disposés des ustensiles appelés "tampo", en aluminium ou en étain, ou alors directement des tokkuri.
Quels accessoires pour déguster ?
Les choko sont des contenants parfaits car le col est large et permet la dissipation des vapeurs. En effet, il n’est pas recommandé d’humer le saké comme on le ferait dans une dégustation classique car la sensation d’alcool peut être gênante dans le cas du saké chauffé.
On peut également servir dans une Hirezake, une tasse en céramique munie d'un couvercle. Voici une spécialité de la ville de Shimonoseki à Yamaguchi qui consiste à servir un verre de saké chaud dans lequel est placée une nageoire de fugu grillée (ou de daurade…). Aujourd’hui répandue à travers tout le Japon, c’est un délice qui amène au saké des notes agréablement fumées (à mettre sur votre liste de choses à goûter si ce n’est pas déjà le cas).
Le "fugu Hirezake" consiste à disposer une nageoire de fugu grillée (ou de daurade) dans un saké chaud.
5 SAKES A DEGUSTER CHAUD
Voici notre sélection de cinq sakés à déguster chauds et quelques suggestions d'accessoires pour aller avec !
Tentaka Umakara
Une fois chauffé, la perception de l’umami s’accentue, le saké va s’arrondir tout en dévoilant une superbe acidité pour se marier parfaitement avec des plats riches comme le bœuf bourguignon ou le sukiyaki.
Conseil : Chauffer à 55° et laisser refroidir jusqu’à 40°.
(Accessoire : Fugu Hirezake)
Suehiro Yamahai Junmaï
Le fait de chauffer va souligner le côté sec de ce Junmaï. Idéal pour accompagner les plats simples, tout comme les mets les plus complexes. Avec une raclette par exemple ou un oden imprégné à la sauce soja ou au dashi.
Température recommandée : 45°C.
(Accessoires : Tetsusabi Tokkuri et choko)
Kameman Tokubetsu Honjozo
A 50°C, les notes céréalières et fruitées de banane et de raisin affirment leur présence. Un excellent accompagnement pour les plats de type Izakaya (gyoza ou yakitori) mais aussi pour des préparations plus communes comme une ratatouille ou un gratin.
(Accessoires : Janome Tokkuri et choko)
Yamasan Masamune Yamahai
Chaud, l’acidité de Yamasan Masamune devient plus marquée pour lui permettre de s’apparier à merveille avec les fromages, une belle fusion en bouche ! Une expérience originale, saké japonais et fondue savoyarde, y compris dans sa préparation.
(Accessoires : Kanzake set)
Amabuki Kimoto Junmai Daiginjo
Voici un cas particulier avec l’un des rares Daiginjo qu’il est intéressant de faire chauffer. Pas trop tout de même, à 40°C maximum, pour éviter de voir les arômes disparaitre. Avec ses notes fruitées, lactiques, épicées et mentholées, ce saké se marie idéalement avec un poisson nitsuke (cuit dans la sauce soja) ou alors un magret de canard.
(Accessoires : Kihara Hakemaki sake set)
Nous espérons que ces quelques recommandations vous auront donné l'envie de découvrir le saké sous un autre angle. N'hésitez pas à nous contacter pour tout renseignement complémentaire.
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